Jackson (Julian), Arcadie : La vie homosexuelle en France, de l'après-guerre à la dépénalisation, Paris, éditions Autrement, 2009
Notice d'autorité BnF : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb14831612m
Notice Wikipédia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Andr%C3%A9_Baudry
directeur de la revue Arcadie
André Baudry, né en 1922, est le fondateur du mouvement dit homophile appelé Arcadie, qui est initialement le nom d'une revue littéraire et scientifique, puis un cercle de réflexion et de convivialités qui deviendra un club privé. André Baudry est formé chez les jésuites, devient séminariste, enseigne la philosophie dans le secteur privé, puis écrit sous le pseudonyme d'André Romane dans la revue homosexuelle suisse-allemande Der Kreis (Le Cercle, 1932-1967).
Assez vite alors, au début des années 50, André Baudry s'oriente vers la création d'un cercle de convivialités, proposition d'un lieu d'expression d'opinions diverses et d'un projet commun à des homosexuels, en organisant des réunions chez lui. Le contexte des années 50 n'est pas des plus permissifs, mais parler de clandestinité serait sans doute excessif, et il faut néanmoins rappeler que la répression était réelle et que la police procédait régulièrement à des arrestations, notamment pour outrages publics.
Parallèlement, le contexte intellectuel de l'après Seconde Guerre mondiale voit se mettre à jour de nouvelles données scientifiques et littéraires: publication du rapport Kinsey aux Etats-Unis en 1948 et qui connait un grand retentissement, publication du Deuxième sexe de Simone de Beauvoir en 1952, soutenance de thèse de théologie « Vie chrétienne et problèmes de la sexualité » par l'abbé Oraison (Marc Oraison, prêtre et médecin français) en 1952 également.
Il crée sa propre revue mensuelle en 1954, qui reçoit le soutien de Jean Cocteau et Roger Peyrefitte, et paraît sans interruption jusqu'en 1982. Cette revue de format in-8° et d'environ soixante pages, se compose d'une sélection d'articles écrits par des écrivains et intellectuels. Sa composition est très sobrement ornée, en quête évidente de respectabilité. La ligne éditoriale de la revue a pour but d'édifier le lecteur homophile et d'explorer les causes scientifiques de l'homosexualité. Le projet Arcadien consiste ainsi en un positionnement discret sans renoncer à la différence, tout en s'efforçant de donner des clefs morales, religieuses et scientifiques à l'existence de l'homosexuel dans la société. Malgré sa prudence et son lissage, Arcadie fait l'objet d'une interdiction de vente aux mineurs et à son exposition sur la voie publique le 26 mai 1954. André Baudry passe en correctionnelle en 1955 mais n'est pas condamné. La revue est condamnée en 1956 pour outrage aux bonnes moeurs comme une vulgaire publication pornographique.
Attaché aux principes de convivialité et de partage, André Baudry double la revue d'un club, dont l'abonnement à l'un ne peut se faire sans l'autre, appelé CLESPALA (Club littéraire et scientifique des pays latins) en 1957, et revêtu de la personnalité juridique sous la forme d'une société anonyme. Un local de 150 m2 est ouvert rue Béranger, accessible aux majeurs (+ de 21 ans). C'est avec ce club que sera organisé à partir de 1958 un grand banquet annuel se tenant en divers endroits. En 1969, le club migre vers une salle plus grande, rue du Château-d'Eau dans le Xe arrondissement. En 1982, à l'âge de 60 ans, André Baudry met fin délibérément au mouvement Arcadie et part vivre avec son ami originaire de Naples sur la presqu'île sorrentine à Santa Agata sui due Golfi.
Serge Regley a été le correspondant et le collaborateur d'Arcadie pour l'Est de la France.