Voici le texte du décret du 7 ventôse an III :
« CHAPITRE PREMIER. — Institution des écoles centrales.
« ARTICLE PREMIER. — Pour l'enseignement des sciences, des lettres et des arts, il sera établi, dans toute l'étendue de la République, des écoles centrales distribuées à raison de la population ; la base proportionnelle sera d'une école par trois cent mille habitants.
« ART. 2. — Chaque école centrale sera composée :
« 1° D'un professeur de mathématiques ;
« 2° D'un professeur de physique et de chimie expérimentales ;
« 3° D'un professeur d'histoire naturelle ;
« 4° D'un professeur d'agriculture et de commerce ;
« 5° D'un professeur de méthode des sciences ou logique, et d'analyse des sensations et des idées ;
« 6° D'un professeur d'économie politique et de législation ;
« 7° D'un professeur de l'histoire philosophique des peuples ;
« 8° D'un professeur d'hygiène:
« 9° D'un professeur d'arts et métiers ;
« 10° D'un professeur de grammaire générale ;
« 11° D'un professeur de belles-lettres ;
« 12° D'un professeur de langues anciennes ;
« 13° D'un professeur de langues vivantes, les plus appropriées aux localités ;
« 14° D'un professeur des arts de dessin.
« ART. 3. — Dans toutes les écoles centrales, les professeurs donneront leurs leçons en français.
« ART. 4. — Ils auront tous les mois une conférence publique sur des matières qui intéressent le progrès des sciences, des lettres et des arts les plus utiles à la société.
« ART. 5. — Auprès de chaque école centrale, il y aura :
« 1° Une bibliothèque publique ;
« 2° Un jardin et un cabinet d'histoire naturelle ;
« 3° Un cabinet de physique expérimentale ;
« 4° Une collection de machines et modèles pour les arts et métiers ;
« ART. 6. — Le Comité d'instruction publique demeure chargé de faire composer les livres élémentaires qui doivent servir à l'enseignement dans les écoles centrales.
« ART. 7. — Il sera statué, par un décret particulier, sur le placement de ces écoles.
« CHAPITRE II. — Jury central d'instruction. — Professeurs.
« ARTICLE PREMIER. — Les professeurs des écoles centrales seront examinés, élus et surveillés par un jury central d'instruction, composé de trois membres nommés par le Comité d'instruction publique.
« ART. 2. — Le jury central sera renouvelé par tiers tous les six mois. Le commissaire sortant pourra être réélu.
« ART. 3. — Les nominations des professeurs seront soumises à l'approbation de l'administration du département. »
(Les articles 4 à 8 stipulent que, dans le cas de conflit entre le jury et l'administration, le Comité d'instruction publique aura à prononcer.)
« ART. 9. — Le traitement de chaque professeur des écoles centrales est fixé provisoirement à 3000 livres. Dans les communes dont la population s'élève au-dessus de 15000 habitants, il sera de 4000 livres. Dans les communes au-dessus de 60 000 habitants, il sera de 5000 livres.
« ART. 10. — Il sera alloué tous les ans, à chaque école centrale, une somme de 6000 livres pour frais d'expériences, salaire des employés à la garde de la bibliothèque, du cabinet d'histoire naturelle, et pour toutes les dépenses nécessaires à l'établissement.
« ART. 11. — Le Comité d'instruction publique est chargé d'arrêter les règlements sur le régime et la discipline intérieure des écoles centrales.
« CHAPITRE III. — Elèves de la patrie. — Prix d'encouragement.
« ARTICLE PREMIER. — Les élèves qui, dans la fêle de la jeunesse, se seront le plus distingués, et auront obtenu plus particulièrement les suffrages du peuple, recevront, s'ils sont peu fortunés, une pension annuelle pour se procurer la facilité de fréquenter les écoles centrales.
« ART. 2. — Des prix d'encouragement seront distribués tous les ans, en présence du peuple, dans la fête de la jeunesse. Le professeur des élèves qui auront remporté le prix recevra une couronne civique.
« ART. 3. — En conséquence de la présente loi, tous les anciens établissements consacrés à l'instruction publique sous le nom de collèges, et salariés par la nation, sont et demeurent supprimés dans toute l'étendue de la République.
« ART. 4. — Le Comité d'instruction publique fera un rapport sur les monuments et établissements déjà consacrés à l'enseignement public des sciences et des arts, comme les jardins des plantes, .les cabinets d'histoire naturelle, les terrains destinés a des essais de culture, les observatoires, les sociétés des savants et artistes, qu'il serait bon de conserver dans le nouveau plan d'instruction nationale. »
Les écoles centrales sont des établissements créées par décret du 7 ventôse an III (25 février 1795) modifié par le titre II de la loi Daunou du 3 brumaire an IV (25 octobre 1795) sur l'organisation de l'Instruction publique. Elles sont la traduction dans les faits des écoles intermédiaires prévu dans le plan général d'instruction présenté par Condorcet le 30 janvier 1792 au Comité d'instruction publique.
L'école centrale du Panthéon ouvre ses portes le 1er prairial an IV (20 mai 1796) dans les bâtiments de l'abbaye Sainte-Geneviève. La même année sont ouvertes deux autres écoles centrales à Paris, l'école centrale des Quatre Nations et celle de la rue Saint-Antoine.
En août 1799, l'école regroupe neuf professeurs qui sont les citoyens :
- Binet, professeur de langues anciennes,
- Mahérault, professeur de langues anciennes,
- Cuvier, professeur d'histoire naturelle,
- Labey, professeur de mathématiques,
- Duhamel, professeur de grammaire générale,
- Bélis, professeur de belles lettres,
- Boisjolin, professeur de philosophie de l'histoire,
- Perreau, professeur de législation
- Bachelier, professeur de dessin.
L'arrêté préfectoral du département de la Seine du 6 frimaire an IX (27 novembre 1800) prescrit qu'à l'avenir toute autorisation d'ouverture d'école particulière, maisons d'éducation ou pensionnats sera demandée au maire de l'arrondissement et statuée d'après son avis par le préfet du département. Pour obtenir cette autorisation, il faut fournir un procès-verbal d'examen du jury d'instruction publique, un certificat de mœurs et un certificat de promesse d'être fidèle à la Constitution. La constitution du jury d'instruction publique est fixé le 13 nivôse an IX (3 janvier 1801) dans un arrêté publié par le préfet stipulant que les professeurs des trois écoles centrales de Paris forment le jury d'instruction publique chargé d'examiner les instituteurs et institutrices et de délivrer les procès-verbaux. Les professeurs de l'école des Quatre Nations exercent dans les quatre premiers arrondissements, ceux de l'école de la rue Saint-Antoine dans les 5, 6, 7 et 8èmes arrondissements et ceux de l'école du Panthéon dans les 9, 10, 11 et 12èmes arrondissements. Le jury d'instruction a tenu soixante séances jusqu'au 29 nivose au XII (20 janvier 1804).
L'adoption de la loi du 11 floréal an X (1er mai 1802) supprime progressivement les écoles centrales pour les remplacer par des lycées, écoles secondaires ou collèges. En ce qui concerne Paris et les départements avoisinants, c'est l'arrêté du 23 fructidor an XI (10 septembre 1803) qui les supprime ; il porte ce qui suit : « Dans le cours de l'an XIII, il sera établi à Paris trois lycées à la place des trois écoles centrales actuelles. Les trois écoles centrales de Paris, les écoles centrales de Seine-et-Oise, de Seine-et-Marne, d'Eure-et Loir, de l'Yonne et de l'Aube seront fermées à dater du 1er vendémiaire an XIII. Les fonds des écoles centrales supprimées par le présent arrêté seront affectés à l'entretien des lycées de Paris. ».
Le 23 septembre 1804, le lycée Napoléon (qui portera plus tard le nom de lycée Henri-IV) ouvre ses portes dans les locaux de l'école centrale du Panthéon.