Trois générations d’artistes jongleurs et musiciens de music-hall :
• Elie Fernand Charmasson dit Harris Dalcy (Pertuis (Vaucluse), 10 décembre 1888-Paris, septembre 1963)
• Felicie Charmasson dite "Les Dalcy", née Bernard (Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône), 15 octobre 1885-Marseille (Bouches-du-Rhône), 23 juin 1949)
• Emile Albert Alexis Charmasson dit Dalcy du "Trio Dalcy" (Toulon (Var), 30 juillet 1905-Paris, 18 mai 1952)
• Louis Elie Emile Charmasson dit Dalcy du "Trio Dalcy" (Paris, 3 décembre 1911-25 mars 1979)
• Ursule Léontine Joséphine Charmasson dit Dalcy, née Azema ; dite Suzy Azema, dite Monique Girard (Aubagne, 1er octobre 1912-Lons-le-Saulnier (Jura), 31 janvier 1963)
• Christiane Charmasson dit Dalcy (Paris, 24 juillet 1943-)
1906-1925 : Les débuts d'Harris Dalcy et des Dalcy
Le fondateur de la dynastie Dalcy est Elie Fernand Charmasson né à Pertuis le 10 décembre 1888. Après une formation de coiffeur où il a notamment appris à jongler avec des blaireaux, Fernand décide à dix-sept ans de quitter le sud de la France pour Paris. Il a rencontré quelques temps plus tôt Félicie Bernard née le 15 octobre 1885 à Aix-en-Provence. Cette dernière lui donne un premier fils, Émile né le 30 juillet 1905 à Toulon puis un second, Louis né le 3 décembre 1911 à Paris. À partir de cette période, Fernand commence à être connu sous le pseudonyme d'Harris Dalcy. Il tourne beaucoup en France et en Algérie et les journaux saluent "le roi des jongleurs comiques" (in L'Artiste lyrique du 28 octobre 1911). Felicie, qui a épousé Fernand à Paris le 12 mars 1912, assure l'administration des tournées alors qu'il travaille sur scène. Peut-être ont-il monté quelques numéros ensemble sous le nom de scène "Les Dalcy" avant qu'il ne soit repris vers 1920 par le duo constitué d'Émile et Fernand.
1925-1952 : La période du Trio
À partir de 1925, Felicie qui continue à tenir d'une main de maître les rènes administratifs laisse la scène à son mari et ses fils qui fondent le "Trio Dalcy". Ils poursuivent dans la veine du jonglage comique et sont reconnus pour leurs numéros ultra-rapide. Ensemble ils jouent dans les plus grands music-halls et cirques de France comme le Théâtre de l'Empire, le Lido, Pacra, Bobino, l'Alhambra, le Moulin Rouge, l'Olympia et le Cirque Medrano mais aussi d'Europe comme au Cirque Schumann à Copenhague, au Cirque Strasburger à Amsterdam ou à l'Apollo Theatre de Dusseldorf. Les cachets s'enchaînent et le trio est très demandé jusqu'au décès brutal d'Émile en mai 1952. Dés lors, Fernand cesse toute activité scénique et Louis fonde un nouveau duo avec son épouse, la pianiste Monique Girard.
1952-1965 : Monique et Louis Dalcy et Les Dalcy
Monique Girard est connue à l'état civil comme Ursule Azéma. Elle vient d'une famille bourgeoise et a fait des études de musique classique au conservatoire de Marseille. Elle se fait d'abord connaître sous le nom de Suzy Azema lorsqu'elle anime les cafés-dansant l'été en Provence et découvre la variété. Puis elle prend le pseudonyme de Monique Girard et c'est sous cette identité qu'elle accompagne au piano la chanteuse Damia ou le chansonnier Jean Marsac. Monique et Louis ont une fille prénommée Christiane le 24 juillet 1943. Elle les suit dans le tourbillon des tournées pendant les premières années de sa vie puisque les Dalcy travaillent et voyagent en famille. Le décès de Félicie en 1949 a sans doute poussé le couple à placer Christiane en pension (Paris, Marseille, Nogent-sur-Marne notamment à la pension Marie-Claire). À quatorze ans, elle rentre à l'internat du Lycée mixye Marseilleveyre où s'expérimente l'autodiscipline.
La Seconde guerre mondiale marque un coup d'arrêt dans leurs tournées européennes. Jusqu'en 1943, ils arrivent à poursuivre leurs activités dans le sud de la France et en Suisse mais à cause de l'occupation totale du territoire français et de la naissance de Christiane ils passent les trois dernières années de la guerre à Paris au Lido, à l'Alhambra, au Cinéma Paramount, à Bobino et au Cirque Medrano entre autres. Dans la période d’immédiate après-guerre, entre mars et septembre 1946, les Dalcy participent à une tournée en zone américaine en Allemagne. Pour Monique c'est la découverte du jazz et de nouvelles sonorités.
Quand Émile meurt subitement en mai 1952, le Trio Dalcy cesse et Fernand arrête sa carrière. Pour continuer Louis fonde avec Monique un numéro de jonglage en musique où elle joue du piano, de l’accordéon et du xylophone. Ce dernier lui a été fabriqué par le clown Grock en palissandre et est une réplique de son propre xylophone. En 1947, lors d'une tournée à Stockholm, il lui a appris à jouer de cet instrument.
Leur duo est connu sous le nom de Monique et Louis Dalcy. Ensemble ils crée un numéro frontal de douze minutes où Louis jongle successivement avec balles, chapeaux claques, massues. Le final avec les massues est réalisé en lumière noire. Ce nouveau numéro marque la fin de la collaboration avec les cirques dont la piste circulaire ne se prête pas aux numéros frontaux. Ils entament une nouvelle collaboration avec les "Productions Rigolet" dont le directeur est Roger Rigolet. Ainsi ils participent à la tournée "Boum, voilà Montmartre !" sponsorisée par la société Philbée/Amora, à des tournées avec Les Chansonniers, au tirage de la Loterie nationale et enchaînent les galas. Leur duo cesse en 1962 quand Monique apprend qu’elle est atteinte d’un cancer. Elle décède en janvier 1963 après avoir préparé le nouveau duo de Christiane, sa fille, et de Louis.
Christiane qui a quitté l'école en 4e pour suivre ses parents en tournée dans la caravane rivastella familiale. Elle aide à l'organisation administrative des tournées, à la préparation du plateau et notamment de l'éclairage et de la sonorisation. Elle apprend avec sa mère à jouer du xylophone. Elle poursuit ses études par correspondance grâce au CNTE et aux revenus de ces travaux. Quand sa mère tombe malade, Louis est encore trop jeune pour prétendre à la retraite et Christiane (qui n'a pas passé le baccalauréat) également trop jeune pour passer le concours d'entrée à l'université en médecine (elle doit attendre d’avoir vingt-et-un ans révolu). Ensemble ils fondent donc un nouveau duo qui perpétue le final en lumière noire où les fleurs de la nappe du xylophone, les baguettes pour en jouer et le pantalon de Christiane sont fluorescents. Ils jouent aux entractes dans les cinémas et les music-halls. Lors de l’été 1963, Christiane a vingt ans et enchaîne les galas dans le Midi avec son père. Ils jouent à Nice avec Gilbert Bécaud, Charles Aznavour, Colette Renard, au Théâtre antique d’Orange avec Johnny Halliday et Sylvie Vartan, à Nîmes avec Jacques Brel et Reda Caire. En 1964, elle organise en parallèle la programmation du Cirque Moreno à Bordeaux et aide la troupe dans ses démarches administratives (campagnes d'affichage, de publicités et les déclarations de la SACD et de la SACEM). En 1965, Christiane réussit le concours d'entrée à l’université pour entamer des études de médecine. En septembre c’est la fin de l’aventure familiale. Mais les années 1960 voient aussi la fermeture de nombreux music-halls français comme l’Alhambra, l’Étoile, l’ABC.