Stela of Vat Pothivong Leu (K. 1239), 574 śaka EpiDoc Encoding Kunthea Chhom Arlo Griffiths intellectual authorship of edition Gerdi Gerschheimer Kunthea Chhom Arlo Griffiths DHARMA Siem Reap; Lyon DHARMA_INSCIK01239

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jayatīndrādidevāsyaś śrīmān yajñapatīśvaraḥ jita-svarājyair yyas sādhu tarppito bhuvi yajvabhiḥ vibhūti-yajñaiẖ khyātena rājñā śrīśānavarmmaṇā yo 'mātya-mukhyo 'dhikr̥ta kr̥tajño lekha-vācakaḥ śauryya-tyāgādi-yuktena rājñā śrībhavavarmmaṇā yaś cārtha-vastu-gaṇanā -niyukto lekha-vācakaḥ Ā-campā-bhūmi-jayinā rājñā śrījayavarmmaṇā san-mānya-siddhāyatana -pālane yas samarppitaḥ Ācāryya-kavicandreṇa gurvva yajñeśvarasya pratimā catur-dvīpeṣu-gaṇite śakābde rohiṇīndur yyadā pauṣa -sitaidaśa-sare yad dattam asyai dāsādi tepy apaharanti ye te yāntv avīcī-narakam ati-dīrgghaṁ savāndhavāḥ vraḥ kamra
-dvīpeṣu- It seems that chronological considerations make it necessary to correct this to -dvipeṣu-.

Victorious is the illustrious Yajñaptīśvara, who, to be venerated even by the gods such as Indra, is well satisfied on earth by those patrons yajvan who have conquered their own kingdoms.

By King Śrī Īśānavarman I, renowned for his abundant patronage yajña, the grateful secretary was appointed as chief minister.

By King Śrī Bhavavarman II, endowed with heroism and liberality, the secretary was employed for accounting of wealth and property.

By King Jayavarman I, who conquered the earth up to Campā, he was transfered to the protection of sanctuaries esteemed by good people.

By him, the preceptor Kavicandra, who his master, the image of Yajñeśvara has been installed, in the Śaka year reckoned by four, 7 islands, 5 arrows i.e., 574, , when the moon was in Rohiṇī, on the eleventh day of the waxing fortnight of the month Pauṣa.

Those who steal whatever slaves, etc., he has also given to it the image, they will for a very long time go to the Avīcī-hell, together with their relatives.

Gloire à Sa Majesté le Seigneur qui est le / du Maître du Sacrifice, honoré par les dieux à commencer par Indra, lui que satisfont comme il convient lui que les patrons yajvan qui ont conquis le ciel jita-svar ont satisfait tr̥p- comme il convient sādhu par des libations de beurre fondu ājyaiḥ sur terre bhuvi, ici-bas, les sacrifiants qui ont conquis leur propre royaume un royaume indépendant par leurs offrandes.

Secrétaire, il fut nommé, lui qui discerne le bien, principal ministre/conseiller par le roi Śrī Īśānavarman, renommé pour *** et ses sacrifices.

Et toujours secrétaire, il fut chargé par le roi Śrī Bhavavarman, doué de vaillance, de générosité, etc., de la comptabilité des biens matériels.

Il fut préposé par le roi Śrī Jayavarman, conquérant de territoires (allant) jusqu’au Campā, à la garde du *** de ***.

Le Maître Kavicandra « Lune parmi les poètes » a installé une image de Yajñeśvara « le Seigneur du Sacrifice » .

En l'an śaka compté par quatre, les 7 continents et les 5 flèches, , alors que la Lune était dans la mansion lunaire Rohiṇī, au onzième jour de la quinzaine claire du mois de pauṣa.

Ceux qui s’emparent des esclaves, etc., qu’il a également donnés à cette image, qu’ils aillent dans l’enfer Avīcī pour très longtemps, avec leur parentèle.

Après plusieurs essais infructueux ou peu concluants d’interpréter le vers a en y lisant le terme āsya comme nom (neutre) signifiant « bouche, gueule », je me résous à l’interpréter en y voyant l’adjectif d’obligation (gérondif) āsya du verbe ĀS-, « *** », au sens de... upāsya, e. a. « (devant être) honoré ». Un tel emploi de ĀS- n’est certes pas enregistré par les dictionnaires courants, mais la valeur « to solemnize, celebrate » proposée par MW et Apte [CHECK BR, Schmidt] incite à admettre une telle valeur pour le verbe simple. Moins probablement, on dira que Cf. devavaktra?

yajñapatīśvaraḥ: La mention de la divinité est – peut-être intentionnellement – ambiguë. D’une part, yajñapatīśvara peut s’analyser comme « le Seigneur (īśvara) du yajñapati », c.-à-d. la divinité d’élection du « Maître du sacrifice », en l’occurrence le « sacrifiant », le « donateur » (cf. Barth dans ISC *** sur l’usage ***). Mais il peut aussi s’analyser comme « le Seigneur qui est le Maître du Sacrifice », donc la divinité à qui l’on « sacrifie ». Dans les deux cas, il est quasi certain que le terme renvoie à la divinité même dont l’image est installée par le héros de notre inscription (voir infra st. V), sous le nom de Yajñeśvara, « le Seigneur du Sacrifice ». Le théonyme Yajñapatīśvara n’apparaît, à ma connaissance, que dans une seule autre inscription préangkorienne : K. 30, datée par Cœdès du VIIe s. de n. è., trouvée au V. Chamnom (prov. de Takeo, voir carte ***). Il s’agit là, à n’en pas douter, du véritable nom propre de cette divinité installée par un certain Kr̥ṣṇamitra, désignée deux fois en khmer par vraḥ kaṁmratāṅ ’añ śrī yajñapatīśvara (l. 9-10, 13), mais à laquelle la partie sanskrite ne renvoie que par les épithètes bhagavān īśvaraḥ pra[bhuḥ] (st. Id). L’identification de cette divinité a été plusieurs fois débattue. Bergaigne a émis l’hypothèse que « le dieu est sans doute un Hari-Hara » (note 5 de A. B. dans Aymonier 1883 : 450-451), hypothèse reprise en tant que telle par Aymonier (1900 : 196). Parmentier (1927 : 118) reprend cette identification, mais sans en mentionner, hélas, le caractère hypothétique. En 1942, Cœdès, pour qui « le texte sanskrit parle de la fondation d’un Īśvara, c’est-à-dire d’une image de Çiva », rappelle qu’il « est possible, mais non certain » que la divinité en question soit un Hari-Hara et propose d’expliquer l’hypothèse de Bergaigne par le fait que « Yajñapati [dans le nom khmer de la divinité] désigne parfois Soma ou Viṣṇu » (IC II, p. 26). Vickery, reprenant la question (1998 : 142), se fonde sur des arguments de peu de poids pour avancer que yajñapatīśvara est « a name which more probably indicates Viṣṇu » : parti pour montrer que °īśvara ne désigne pas forcément "Siva dans le corpus préangkorien – ce qui semble hors de doute (cf. la note 34 dans Griffiths 2005 : 20-21) –, il étaie son point de vue en déclarant que le terme bhagavant, dans bhagavān īśvaraḥ, « is more likely Viṣṇuite than Śivaite » et que « the name of the establishment’s founder, Kr̥ṣnamitra, is also Viṣṇuite ». La connotation vishnouite de bhagavant est aussi mal établie que celle de īśvara (cf. n. 34 dans Griffiths 2005 : 21). Quant au nom d’un donateur, il ne reflète pas forcément son obédience religieuse : Yajñavarāha, fils du brahmane Dāmodara, et son frère utérin Viṣṇukumāra, au Xe s., ont des noms typiquement « vishnouites » — le « sanglier du Sacrifice », « *** » ; le premier *** K. 842, st. IX *** ; le second *** ***.

kr̥tajño: Kr̥ta-jña est souvent ambigu. Signifiant « qui connaît ce qui est bien, correct », il justifie ici la décision du roi de nommer Kavicandra au poste en question ; mais le composé, entendu comme « qui reconnaît le bienfait », pourrait aussi faire allusion à la reconnaissance que Kavicandra éprouve envers le roi.

lekhavācakaḥ: Le composé lekha-vācaka (littéralement « qui dit, récite, les écrits, les lettres ») ne figure pas dans les dictionnaires courants [CHECK BR etc.]. La capacité à lire les documents (lekha-vācana) est mentionnée comme l’une des qualités du scribe, du secrétaire (lekhaka) dans l’Arthaśāstra de Kauṭilya, au « chapitre des édits » (śāsanādhikāra) : tasmād amātyasaṁpadopetaḥ sarvasamayavid āśugranthaś cārvakṣaro lekhavācanasamartho lekhakaḥ syāt (texte selon R. P. Kangle, I p. 48, 2.10.3), « Therefore [cf. 2.10.2 : For, kings principally depend on edicts (śāsana), peace and war being rooted in them], the scribe should be endowed with the excellences of a minister, conversant with all conventions, quick in composing, with a beautiful hand and capable of reading a document », trad. R. P. Kangle, II p. 106). J’ai supposé que lekha-vācaka désignait ici une fonction du type « secrétaire ».

cārtha-vastu-gaṇanā-: Je ne sais trop que faire du composé arthavastugaṇanā, que j’analyse en « (dé)compte des arthavastu ». Quant à arthavastu, j’y vois un composé non pas copulatif (« artha et vastu », par ex. « biens et objets »), mais déterminatif : « vastu qui est/sont artha », soit, à peu près, « les objets (matériels) qui sont des propriétés, des biens ». La fonction exacte ainsi dénotée n’est pas claire : une sorte de ministre de finances ?

Ā-campā-: À ma connaissance, ceci est la première inscription mentionnant la conquête, par Jayavarman Ier, de « territoires allant jusqu’au Campā », et ce . La préposition ā est hélas amphibologique, qui peut être inclusive ou exclusive ! Voir dans l’histoire du Campā ? Voir K. 989 st. XXX ?

-siddhāyatana-: Le terme siddhāyatana, qu’on retrouve *** , pourrait bien être un siddha-tapovana ou siddha-āçrama (cf. Raghuvaṁça 6.46).

pratimā Bien que rien ne permette ne restituer la forme verbale passive ou le participe passé prédicat de « l’image » (pratimā), il n’est pas douteux que l’opération évoquée est du type « installation » (pratiṣṭhā), (mais peut-être aussi nihitā, etc.). Pour des emplois de pratimā avec *** K. 225, XI ; K. 232, XI ; K. 235, LVIII ; K. 256 st. X, K. 275 st. VII, K. 317 st. IX et K. 713A st. XXVIII, K. 323, K. 324, K. 325, K. 330, K. 331, K. 56B, K. 440 st. XXXIII, K. 567 [passim : à revoir en détail], K. 834 ?, K. 899 ?, XXIX , K. 989, K. 991 ???, K. 1084, K. 1141, st. XXVIII , K. 1151 st. VIII, K. 1228 ???, K. 176 ?, K. 286, XLV ? K. 716 ? K. 782, XIV ; K. 140 ; K. 235, XLVIII ; K. 235, LX ; K. 834 ?; K. 853 ???, K. 875 ? Vérifier aussi sur Sakamoto, Sealang. Il faudrait voir, bien sûr, également nimā !

-dvīpeṣu- Millésime. Le seul autre emploi que je connaisse, dans le corpus des inscriptions du pays khmer, de dvīpa pour désigner 7 – en raison des sept continents de la **** ; cf. ***) – figure dans l’inscription angkorienne K. 253N/***, st. XX (dvīpadvayadvāraiḥ). Encore ne peut-on exclure totalement qu’il faille y lire dvipa° ! Voir ci-dessous. La valeur 4, également possible, nous ramènerait en 544 śaka (= 622/3 de n. è.), sous Īśānavarman Ier (donné comme régnant en *** , en octobre 627 [K. 604] et en ***) ; elle peut donc être exclue ***. La mention de sept continents figure dans des inscriptions de l’époque angkorienne :voir K. 782/*** (11e s.), st. V. ; K. 834/***, st. XXXIX, toutes deux *** ? Voir aussi Pre Rup (K. 806), st. 81, allusion.

-sitaidaśasare Les données certaines du mois, de la quinzaine et de la position de la Lune indiquent que l’on est aux environs, à +/- 2 jours, du 11e jour (cf. Eade 1995 : 34). La lecture certaine de la voyelle ai (pāda d) et celle quasi certaine de la consonne k, permettent de restituer avec certitude le pāda d en sitaikādaśavāsare, « au onzième jour clair ».

asyai Le pronom asyai (datif fém. de idam, « celui-ci ») renvoie assurément à l’image (pratimā) de la stance V. Pour d’autres exemples où c’est bien à l’image qu’est donné quelque chose, voir ... Chercher autre inscription où c’est bien à l’image qu’est donné quelque chose. Cf. K. 567/14e s. (Angkor Thom), st. XXXII, XXXIII, LIX.

avīcī- Le nom de cet enfer – le plus couramment évoqué dans les stances comminatoires de nos inscriptions – est normalement donné, dans les dictionnaires, sous la forme avīci, masculine [CHECK BR]. Il n’y a pas lieu de supposer une erreur chez le lapicide, qui distingue soigneusement, on l’a vu, les ī longs des i brefs (même si une correction avīci° transformerait . Mais Kṣīrasvāmin signale (ad Amarakośa I, narakavarga, st. **) que le mot peut être féminin, et la forme féminine avīcī est attestée, par exemple, dans le Parākhyatantra (V.16a, V.31a : cf. Goodall 2004 : 72 & 76) ou dans le Niśvāsamukha tel que cité par Sanderson 2003-2004, p. 422 n. 270. C’est aussi la forme employée dans K. 1201/654, st. XIIa (avīcī[ṁ] prathamaṁ yānti). K. 299.

Il est fréquent, en particulier dans l’épigraphie angkorienne, que la distinction graphique en i bref et ī long soit délicate sinon impossible. Et une correction de notre texte en caturdvipeṣugaṇite serait a priori envisageable au point de vue de la métrique – le rythme conviendrait à une na-vipulā – comme à celui de l’astronomie ! On serait alors en 584 śaka, avec dvipa, « éléphant », valant pour 8 (les huit éléphants des directions ***). La date serait équivalente au *** : Mais cette correction est sans fondement, l’inscription distinguant soigneusement les i brefs des ī longs, les premiers notés par un cercle (dans Ia, Ic, Id, Id, Id, IIa, IIa, IIc, IIIa, IIId, IVa, IVa, IVc, IVd, Va, Vc, VIa °gaṇite, VIc rohiṇīndur, VId sita°, VIIa, VIIb, VIId), les seconds par un cercle se finissant par une spirale qui prend le plus souvent la forme d’un petit cercle intérieur et tangent au premier (Ia, Ib, Ib, IIb, IIIb, IVb, VIc rohiṇīndur, VIIc, VIIc avīcī° [voir infra], VIId [***]). La probabilité est grande que ce soit bien le mot signifiant « île » qui est visé.

This previously unpublished inscription is edited here by Kunthea Chhom and Arlo Griffiths on the basis of a preliminary edition by Gerdi Gerschheimer, making use of the estampage EFEO n. 1757 and photo 005299.